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mardi 23 janvier 2018

Black Mirror de Charlie Brooker (2011-2017) - ★★★★★★★★☆☆



Netflix encore et toujours. Comme un membre de la famille que l'on retrouve au petit déjeuner et que l'on quitte le soir avant d'aller se coucher. Black Mirror et Dark, c'est un peu la même histoire dans un contexte différent. On commence par tendre l'oreille avec une pointe de scepticisme. Pourquoi notre mensuel préféré ne s'en est-il pas fait l'écho ? Pour une raison simple : c'est de la mauvaise came, offerte pour pas chère à des téléspectateurs « bon public ». Sauf que... en fait, heu, ben pas vraiment !

« Your smartphone is your friend... »

La publicité des années 2010, ça n'est plus ces grands panneaux d'affichage ornés de slogans aux lettres d'imprimerie grandes comme un homme dans la force de l'âge. Les consommateurs eux-même la produisent. Partout dans la rue, dans le bus, dans le métro, dans le train, au travail, à la maison. Tiens, prenons comme exemple le train. Montons à l'arrière, dans le wagon de queue, et remontons jusqu'à la locomotive. Parions que dans toutes les voitures, nous trouverons des dizaines d'individus la tête penchée sur l'écran de leur minuscule smartphone, tous connectés sur la toile, parcourant leur page Facebook, se prenant en selfie, ou pianotant comme des fous sur leur micro clavier tactile.
Face à cet ahurissant spectacle, Black Mirror paraîtra comme un bien curieux bain de jouvence à ceux qui ne se sont pas encore abandonné à la pratique du smartphone, nouvel objet de mode, à sensation, poussant toujours à davantage d'individualisme. Ton Smartphone, si jusqu'ici a été ton ami, dis-toi qu'un jour il se retournera contre toi. C'est un peu le message que véhicule la série créée par le journaliste et scénariste britannique Charlie Brooker et diffusée pour la première fois sur la chaîne anglaise Channel 4.

L'une des caractéristique de cette excellente série est de proposer des épisodes dont les récits demeurent indépendants les uns des autres tout en se contentant d'observer les méfaits de la technologie. C'est ainsi qu'en s'inscrivant dans un univers dystopique, Black Mirror propose aux téléspectateurs d'assister aux conséquences néfastes que pourraient avoir les objets qu'ils ont déjà l'habitude d'avoir entre les mains. La série se projette bien sûr parfois beaucoup plus loin, supposant un monde ayant définitivement versé dans l'individualisme radical, l'absence d'émotions, une Terre plongée en plein cadre post-apocalyptique dans lequel les machines ont pris le contrôle de la planète comme c'est le cas avec l'un des épisodes de la quatrième saison, Metalhead....


Le format court et irrégulier (allant de 40 minutes et jusqu'au format long en de rares occasions) est idéal et permet de prendre connaissance de récits qui ne souffrent d'aucune faiblesse en terme de rythme. Chacun y trouvera de quoi contenter sa curiosité, d'autant plus que les messages délivrés se révèlent souvent fort intelligents et relativement crédibles. Une des autres particularités de Black Mirror demeure dans le fait que chaque épisode se termine de manière plutôt tragique, les auteurs n'apportant finalement pas de solution réconfortante aux drames qui se nouent parmi les personnages qu'ils ont eux-même créé. Celui qui n'a jamais vu la série de Charlie Brooker regardera très certainement son téléphone portable sous un nouveau jour. Du moins pour un certain temps, car inévitablement, ce coûteux joujou lui fera suffisamment les yeux doux pour que son propriétaire s'y replonge en oubliant qu'un jour il se retournera peut-être contre lui...

lundi 22 janvier 2018

Dark de Baran bo Odar (2017) - ★★★★★★★★★☆



Lorsqu'il y a deux ou trois ans un ami à moi avait évoqué la plateforme Netflix, la première pensée qui m'est venue était de me dire qu'une fois encore, l'un de mes potes était tombé dans un piège à cons. Avant cela, je n'en avais jamais entendu parler, et même, pourquoi aurais-je déboursé un centime alors que je pouvais à loisir télécharger en toute illégalité n'importe quel film ou série, de n'importe quelle époque et de n'importe quelle origine ? Et puis, lorsque l'occasion de m'y coller s'est réellement présentée, ma première réaction a été de me dire que cette entreprise américaine proposant des films et des séries télévisées en flux continu n'avait sans doute pas grand chose à me proposer d'intéressant. Ce qui était d'ailleurs vrai. Surtout si l'on considère en cela que mon immense mauvaise foi ne m'avait pas poussé à faire davantage que deux ou trois recherches sur le moteur interne de Netlix avant d'affirmer pour moi-même, ainsi que pour les autres à voix haute et perchée, que « Netflix, c'est de la merde. Y'a que des séries et des films pour adolescents boutonneux et décérébrés ». Comme seuls les imbéciles ne changent pas d'avis, chose que je ne cesse de me répéter afin de ne plus camper bêtement et trop fermement sur mes positions initiales, j'ai finalement accepté de « sacrifier » quelques instants à cet étrange outil proposant tant de films, tant de séries, tant de spectacles et tant de documentaires pour une somme si modique.
Une question que je ne cesse de me poser, à laquelle je laisse pourtant le champ libre afin de me consacrer désormais presque corps et âme au contenu de Netflix. Reconnaissons-le, si en bien des occasions, j'ai tendance à mettre l'ordinateur sur « off », n'ayant rien trouvé de réellement concluant (les classiques disponibles, je les ai déjà vus, et quant aux autres, la plupart ne sont que de sombres merdes qui ne méritent pas mon attention ! (oui, je le reconnais, je suis modeste), il y a parfois de bonnes surprises. Et même d'excellentes.

Tout d'abord, je voudrais rendre hommage à Micou et Anna, sans lesquelles, je serai demeuré le vieil ours buté, coincé dans ma bulle « pro-téléchargement illégal », des œillères chevalines plantées au milieu du visage, à regarder devant moi, sourd à toutes propositions. Le genre à finir seul, en robe de chambre et chaussons molletonnés, dans un fauteuil à faire des mots fléchés, ou à bouffer à l'aide d'un plateau repas en attendant « Questions pour un Champion ». Merde ! J'ai quand même failli m'y laisser glisser. La première débourse la maille (déjà), mais est surtout d'un précieux conseil. C'est d'abord grâce à elle qu'est entré dans ma vie Netflix. Pourtant, je devrais lui en vouloir. Comme je devrais en vouloir à Anna. Comme si l'une m'avait maintenu le bras ouvert, manche relevée jusqu'au coude, et la seconde m'avait injecté une dose d'héroïne.
Faut quand même pas déconner. Sur ce coup là, j'ai l'impression d'avoir pris la place de Sara Goldfarb du traumatisant Requiem fort a Dream de Darren Aronofsky. Surtout depuis hier. Anna ne me contredira pas lorsque j'affirme que les pouvoirs de suggestion, parfois hypnotique, et de la dépendance peuvent avoir de lourdes conséquences. Au point que tout le reste n'ait plus aucune importance. Et dire que ce délicieux poison que l'on s'injecte directement à travers la rétine ne coûte pas plus d'un paquet de clopes, j'ai presque peur du complot ourdi par des hommes d'états cherchant à lobotomiser leurs concitoyens en les éloignant des choses fondamentales de l'existence en les poussant à pénétrer des univers sans cesses inédits.

Ces fameuses drogues d'ailleurs, dont, fort heureusement, celles-ci n'ont en réalité pas vraiment d'incidences physiologiques. Tout au plus, certaines feront naître chez certains, des vocations. Mais de quoi je parle, là !!!

DARK, est la série qui nous tient si fort en haleine. Et tel est son nom. Bienvenue à Winden, ville imaginaire d'Allemagne, dont la population est digne de celle rencontrée à quelques milliers de kilomètres de là, dans une autre cité imaginaire du nom de Twin Peaks. Mais ne croyez pas que le cinéaste suisse Baran bo Odar se soit contenté de reproduire à l'européenne le flamboyant contexte de la série culte de David Lynch. Non. Car le récit de Dark, la série, n'a rien de commun avec Twin Peaks, la série. A part peut-être l'intelligence de son écriture. Encore heureux que d'avoir été écrit à dix mains par le cinéaste lui-même mais aussi par Jantje Friese, Martin Behnke, Ronny Schalk et Marc O. Seng, Dark est de plus magistralement interprété. Les amateurs de surnaturels, mais pas ceux qui vouent un amour exclusif aux fantômes, aux vampires ou aux zombies, adoreront cette excellente série mêlant avec beaucoup de génie thriller et fantastique. L'une des qualités essentielles de Dark est d'évoquer certaines thématiques (comme le voyage dans le temps) sans pour autant être redondante. On ne s'y ennuie pas un seul instant et pour les amateurs de twists, cette série tournée à Berlin (et oui !) est un véritable festival de révélations. Sans trop vouloir en révéler le contenu, disons que Dark propose une intrigue tournant autour de plusieurs disparitions ayant eu lieu à trente-trois ans d'intervalles. La série propose ainsi de passer de l'année 2019, à l'année 1986, et vice-versa. Les histoires personnelles de ses habitants s'entremêlent, toujours avec un luxe de cohérence qui parfois pêche dans d'autres séries du même genre. L'interprétation est sans faille et chaque personnage est scrupuleusement étudié. Le scénario est complexe tout en étant admirablement construit, ce qui rend finalement l'intrigue limpide. Il n'est d'ailleurs pas rare que l'on soit épaté par certaines révélations. L'Allemagne et Netflix nous offrent en ce début d'année 2018, l'une des meilleures séries fantastiques de ces dernier mois. A découvrir de toute urgence...
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