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vendredi 7 décembre 2018

Six crimes sans assassins de Bernard Stora (1990)



Il y a des nouvelles qui vous tombent dessus sans prévenir. Comme la disparition d’Étienne Chicot. Du moins, si elle a un tant soit peu marqué l'esprit des cinéphiles. Et dire que je n'étais même pas au courant... Un acteur remarquablement naturel, poussant le soin du réalisme et de la simplicité jusque dans le moindre de ses soupirs. Il s'en est allé comme bon nombre avant lui, à l'âge de 69. On a souvent l'habitude de le dire chaque fois qu'un acteur décède : « Il a joué avec les plus grands ». Et bien lui aussi. Du moins, avec certains. Joseph Losey, Claude Sautet, Claude Miller, Alain Corneau, et j'en passe. Du côté des comédiens, il a partagé l'affiche avec Yves Montand, Catherine Deneuve, Michel Galabru, Jean-Pierre Bacri, Nicole Garcia, et j'en passe... beaucoup d'autres. Des films dans lesquels il a joué, ça n'est peut-être pas lui dont on se souviendra. Dont se remémorera le plus grand nombre. Mais moi, si. Le Michel du Choc de Robin Davis. Le Samrat du Kamikaze de Didier Grousset, le Christian de Mort un Dimanche de Pluie de Joël Santoni. On aurait même rêvé découvrir un jour les scènes coupées du Subway de Luc Besson demeurées jusqu'à ce jour invisibles. Acteur de cinéma, homme de théâtre, Étienne Chicot était également musicien, et si l'on n'était pas forcément au courant, il fut notamment auteur des bandes originales du Plein de Super d'Alain Cavalier (aquel il participa en tant qu'interprète et scénariste) et de On Efface Tout de Pascal Vidal.

Même s'il n'y tenait pas le rôle principal à proprement parler, Jean-Pierre Marielle et Fabrice Luchini se partageant la vedette, c'est à travers le téléfilm Six Crimes sans Assassins (qu'il ne faudra surtout pas confondre avec Six Femmes pour l'Assassin d'un certain... Mario Bava) que j'aimerais rendre hommage à l'un de mes comédiens préférés. Un acteur formidablement attachant, amoureux du bon vin, de Pigalle, véritablement passionné par, oui... Véronique Samson.

Six Crimes sans Assassins, c'est l'histoire un peu étrange d'un flic et de celui auquel est confiée la rude tâche d'écrire les mémoires. Le premier est une figure de la police. Cynique et mélomane. Le second, lui, est écrivain, poltron comme il se définit lui-même, et hurle lorsqu'il tombe nez à nez avec un cadavre. Mais qui ne réagirait pas de cette façon ? Un mort, une blessée. Puis un second cadavre. Maître Charasse (Étienne Chicot) les connaît tous. Cet avocat s'intéresse de très près au mystère qui entoure ces morts. Le meurtrier demeurant introuvable sur le lieux des crimes alors même que l'immeuble où ils ont eu lieu est cerné par la police et les témoins, voilà qui ne fait pas l'affaire du commissaire Darnoncourt (Jean-Pierre Marielle, impérial) et de l'écrivain Simon (Fabrice Luchini). Humour (noir), enquête policière, suspens, si Six Crimes sans Assassins ne brille en réalité pas par son scénario quelque peu fantaisiste mais finalement, assez laborieux, son atout principal demeure dans les dialogues. Marielle fait du Marielle. On ne lui en voudra pas. Bien au contraire. Vingt ans après ses débuts, Luchini, lui, continue de nous abreuver de son timbre et de sa verve et offre une formidable interprétation et s'exprime en grande partie sous la forme d'une voix-off revenant sur l'affaire. Étienne Chicot incarne cet avocat échappant de justesse à un empoisonnement et réapparaît avec la régularité d'un métronome. Sans doute moins impliqué de part son rôle, il n'empêche, qu'Étienne Chicot y campe un personnage au moins aussi important que ses deux acolytes.

Six Crimes sans Assassins est réalisé par le cinéaste marseillais Bernard Stora, lequel a également écrit le scénario auprès de Jackie Berroyer d'après le roman de Pierre Boileau. Sa première diffusion eut lieu sur la deuxième chaîne française en 1990. Une œuvre atypique, tantôt amusante, tantôt intrigante. A voir surtout pour le regretté Étienne Chicot et pour ses deux partenaires...

Étienne Chicot
5 mai 1949 – 7 août 2018

"Mort un mardi ensoleillé"




dimanche 2 décembre 2018

Origin de Paul W.S. Anderson (en collaboration avec d'autres cinéastes) (2018) - ★★★★★★★☆☆☆





Après Netflix,puis Amazon (avec Amazon Prime), c'est au tour de Youtube, le plus célèbre site web d'hébergement de vidéos, de proposer ses propres créations sous l’appellation Youtube Originals sur sa nouvelle plate-forme Youtube Premium. Ce programme propose depuis le tout début de l'année 2016 des séries et des films mais les premiers balbutiements ne se font en réalité ressentir chez nous que depuis quelques mois seulement. Proposés dès le 14 novembre dernier dans leur intégralité, certains épisodes de la série de science-fiction Origin sont proposés gratuitement afin de la faire découvrir à celles et ceux qui hésiteraient encore à débourser un peu moins de 10 euros afin de s'inscrire à Youtube Premium. Au premier abord, voir débarquer Youtube dans la sphère des sites proposant du contenu vidéo moyennant une petite rétribution financière a de quoi interroger le client éventuel qui avait jusque là pour habitude de n'y voir que des vidéos mises à disposition par ses propres utilisateurs. Le principe n'étant pas plus stupide que d'y voir s'y engouffrer Amazon, pourquoi pas. Malheureusement, ce qui coince au départ, c'est le nom de Paul W. S. Anderson, lequel est rattaché à une filmographie carrément immonde puisque essentiellement constituée de très mauvais films (le cinéaste a en effet notamment commis la série des Resident Evil, ainsi que les longs-métrages Mortal Combat et Alien vs Predator).
Auteur des premiers épisodes de cette nouvelle série de science-fiction donnant son nom au gigantesque vaisseau en partance pour la planète Théa, la présence de Paul W. S. Anderson au générique n'engage au départ, rien de bon. Lorsque l'on connaît le bonhomme, et surtout son œuvre, il est facile de supposer que Origin ne sera rien d'autre qu'une médiocre série de science-fiction à peine digne de celles proposées par la chaîne Syfy.


Ce que semble d'ailleurs évoquer le premier épisode intitulé The Road not Taken, lequel jette une dizaine d'individus au beau milieu des coursives de l'un des dix anneaux du vaisseau Origin transportant des colons à destination de la planète ThéaC'est qu'il ne s'y passe pas grand chose dans cet épisode. Les interprètes semblent pour la plupart du temps y attendre qu'on leur confie leur texte. De plus, lorsque surviennent les premières séquences horrifiques (la série mêle en effet l'épouvante et l'horreur à la science-fiction), le tout est mené sans la moindre finesse, un peu à la manière habituelle de Paul W.S. Anderson. Donc rien d'inhabituel. Sauf qu'entre ce premier épisode et les neuf qui suivront derrière, le spectateur aura tout le loisir de constater que Origins vaut bien mieux que la plupart des séries estampillées Syfy. La série, dont la réalisation des divers épisodes a également été confiée aux cinéastes Mark Brozel, Ashley Way, Juan Carlos Medina et Jonathan Teplitzky, révèle parfois, mais pas systématiquement, un appétissant contenu. Le changement perpétuel d'auteur se ressent d'ailleurs beaucoup durant une bonne moitié de chacun d'entre eux puisque certains épisodes sont un peu moins convaincants que d'autres. Un détail qui a son importance mais que l'on mettra cependant sur le compte des auteurs des divers scénarii, Mika Watkins, Melissa Iqbal, Joe Murtagh, Jack Lothian et Jon Harbottle.


Ne possédant pas de réelle incarnation se détachant véritablement des autres personnages, Origin offre à chaque interprète une même importance, et surtout, une profondeur et une caractérisation identiques renforcées par des flash-back donnant beaucoup de corps à chacun d'entre eux. La série fait la part belle à la mixité des origines de ses interprètes et donc, de ses personnages puisque l'on y croise notamment les britanniques Natalia Tena et Tom Felton, ainsi que la française Nora Arnezeder ou le japonais Sen Mitsuji. Se situant en partie dans le vaisseau, mais également sur une Terre futuriste à l'allure sensiblement dystopique, Origin possède une architecture généralement froide mais à laquelle on finit par s'accoutumer. Les interprètes sont tous convaincants, sans aucune exception, et le récit, qui mêle des intrigues pourtant déjà vues ailleurs, maintient un rythme suffisamment soutenu pour que le spectateur reste accroché jusqu'au dernier épisode. Les fans d'Alien, le Huitième Passager, de Passengers, de The Thing ou de toute autre production mêlant science-fiction et horreur seront conquis. Il est rare que l'on s’ennuie même si certains passages se révèlent parfois trop lents. On regrettera également la surenchère en matière de Jump Scares qui se comptent par dizaines et dont l'effet recherché, de part leur multiplicité, s'annulent. A part cela, Origins demeure une agréable surprise et laisse présager du meilleur quant à l'avenir de Youtube Originals...

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