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lundi 14 juillet 2025

15 jours ailleurs de Didier Bivel (2013) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Aux États-Unis, ils ont Shock Corridor de Samuel Fuller et Vol au-dessus d'un nid de coucou de Miloš Forman. Et nous, qu'avons-nous ? Le téléfilm 15 jours ailleurs de Didier Bivel. Un homme de télévision dont aucune œuvre n'a jamais vu le jour sur grand écran. Alors, pourquoi comparer ces deux grandes œuvres américaines, ces deux classiques du cinéma outre-atlantique avec ce qui a priori n'est rien d'autre qu'un banal téléfilm français diffusé pour la toute première fois sur France 2 le mercredi soir du 9 octobre 2013 ? Tout simplement parce 15 jours ailleurs est bien plus que ce qu'il ne paraît être et lorsque l'on voir l'état du cinéma hexagonal actuel, il est de bon ton de raviver les mémoires et de se dire que plutôt que d'être condamné à n'être diffusé qu'à travers la petite lucarne, le long-métrage de Didier Bivel aurait amplement mérité d'être projeté dans une salle obscure. Et pourtant, les première images font craindre le pire. Du haut de son statut de simple programme télévisuel, 15 jours ailleurs n'a pas pour vocation de nous en mettre visuellement plein la vue. C'est carré, académique, tout comme l'interprétation dont on n'attend alors rien de particulier. Didier Bourdon y traîne sa bedaine comme un acteur vidé de sa substance. Et pourtant, c'est bien son personnage qui veut cela. Vincent vient de faire un burn-out et a semble-t-il attenté à sa vie. Sur les conseils d'un médecin, son épouse Florence (Agathe Dronne) accepte de le faire enfermer pour quelques jours dans un hôpital psychiatrique. D'abord réticent, ce commercial d'une entreprise qui voit une toute nouvelle concurrente briguer apparemment son poste finit par accepter son sort et se lie d'amitié avec plusieurs autres patients. Et notamment Hélène, jeune femme psychotique à laquelle il va très vite s'attacher. Et pour cause, celle-ci est d'une humeur joyeuse et s'avère être la seule à être capable de dérider notre quinquagénaire. Hélène attend le moment précis où elle pourra enfin quitter l'hôpital afin de retrouver son fils Lucas dont sa sœur a présentement la garde... Si Didier Bourdon paraît être la caution artistique de ce téléfilm beaucoup plus fort et subtil qu'il n'y paraît au premier abord, l'un de ses atouts principaux est la présence à l'écran de l'actrice Judith Chemla.


Vue dans au cinéma à diverses occasions et à plusieurs reprises dans des téléfilms et autres séries télévisées, l'actrice qui alors est âgée de trente ans offre une interprétation magistrale de cette jeune femme psychologiquement travaillée par sa séparation d'avec son fils mais aussi et surtout atteinte de troubles psychiatriques graves que son traitement médicamenteux parvient tout de même à réduire. Du moins, en apparence. Le téléfilm de Didier Bivel, écrit à trois mains par Jean-Pierre Sinapi, Jean-Marc Culiersi et Philippe Bernard est d'une justesse rare. Là où l'humour s'installe au cœur de certaines séquences pour partie regroupées lors de la première moitié du récit, le ton se veut ensuite beaucoup plus grave, mettant ainsi les personnages face aux institutions médicales et judiciaires. Dans le rôle du professeur Adamovitctz, l'actrice américano-roumaine Elina Löwensohn interprète une psychiatre froide employant des méthodes qui paraissent parfois être d'un autre âge et donc peu ''humaines'', entre chambre de confinement et camisole chimique. Dans celui de la juge, Aude Saintier incarne à son tour une magistrate totalement détachée vis à vis des suppliques émis par Hélène, laquelle veut sortir de l'hôpital pour retrouver enfin son fils Lucas. Mais là où le téléfilm de Didier Bivel et le script des trois scénaristes est malin, c'est lorsque les uns et les autres nous cachent un élément fondamental positionnant le spectateur à la hauteur du personnage interprété par Didier Bourdon. N'ayant pas toutes les informations entre les mains, nous nous positionnons d'emblée du côté de la jeune femme. 15 jours ailleurs est un formidable téléfilm, émouvant, touchant, porté par une galerie de personnages secondaires hétéroclites mais surtout par un duo principal qui fonctionne à merveille. Didier Bourdon tient là l'une de ses meilleures incarnations tandis que Judith Chemla s'avère parfois bouleversante dans son interprétation d'une jeune femme psychologiquement instable et donc à la dérive. Bref, l'actrice est tout simplement extraordinaire. Si la comparaison avec les deux œuvres citées plus haut paraît un peu (voir beaucoup) exagéré, au final, 15 jours ailleurs n'a absolument pas à rougir de la comparaison...

 

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