Célèbre créature du
bestiaire fantastique créée avant sa toute première parution en
1818 par la romancière britannique Mary Shelley, Frankenstein fut de
nombreuses fo....... Euh ! Attendez, on reprend tout depuis le
début...... Car en effet, contrairement à ce que beaucoup
prétendent connaître du mythe, Frankenstein n'est pas une créature
mais le nom de celui qui la créa. En effet, le monstre dont il est
question dans le roman Frankenstein; or, The Modern Prometheus est
à l'origine l’œuvre d'un scientifique suisse né à Naples, en
Italie, du nom de Victor Frankenstein. Le premier étant étroitement
lié au second, il n'est donc pas rare qu'on les confonde. D'autant
plus que le cinéma orne en général les affiches de films adaptés
du roman du nom du scientifique tout en arborant principalement sa
création conçue à partir de morceaux de cadavres prélevés sur
différents corps. Si le mythe fut à de nombreuses reprises adapté
sur grand écran ainsi qu'au théâtre, plusieurs adaptations virent
également le jour à la télévision. Parmi ces dernières, deux
furent produites et diffusées en 1973. La première, purement
américaine, fut sobrement intitulée Frankenstein
et réalisée par Glenn Jordan. Quant à la seconde, celle qui nous
intéresse ici précisément fut une collaboration entre l'Amérique
de Richard Nixon et le Royaume-Unis. Une adaptation relativement
prétentieuse, voire osée, qui sous le titre Frankenstein:
The True Story prétendait
donc relater la véritable histoire du scientifique et de sa célèbre
créature. Cependant, l'on découvre rapidement les ambitions du
réalisateur Jack Smight et des scénaristes Christopher Isherwood et
Don Bachardy qui plutôt que de reprendre Frankenstein;
or, The Modern Prometheus
ligne par ligne ont semble-t-il préféré l'actualiser à leur
sauce. Bien sûr, certaines lignes plus ou moins importantes sont
conservées. Et notamment lors de la ''naissance'' du monstre opérée
par Victor Frankenstein. Pourtant, l'un des grands bouleversements du
récit s'inscrit dès l'apparition à l'écran du personnage du
docteur Henry Clerval qu'interprète à l'image l'acteur David
McCallum (Les séries Des agents très spéciaux
et L'homme invisible).
Car si Victor Frankenstein qu'incarne de son côté Leonard Whiting
donnera effectivement la dernière touche à cet étrange rêve
narcissique de toucher à cette forme de divin consistant à donner
la vie à partir de ''matières mortes'', c'est bien son ami Henry
qui dans le cas du téléfilm en est l'initiateur. Une manière pour
Jack Smight d'idéaliser le personnage central du récit quant dans
le roman, celui-ci aura tendance à devenir arrogant au fil du
récit !
Le
téléfilm bouleverse donc la donne et pour une œuvre qui se prétend
être une version véritable du roman de Mary Shelley, la surprise
est en fait relativement conséquente. Ce qui, à vrai dire, n'a que
peu de conséquences sur l'intérêt puisque Frankenstein:
The True Story
est une très bonne surprise interprétée par d'excellent acteurs.
La créature est incarnée par le canadien Michael Sarrazin. Au sujet
de celle-ci, même si elle est elle aussi idéalisée à travers le
visage angélique de son interprète par rapport à la description
qu'en faisait à l'époque la romancière britannique, la créature
retrouve cependant peu ou prou l'intelligence de celle décrite par
Mary Shelley même si elle reste majoritairement muette.
Contrairement aux adaptations cinématographiques où le monstre est
en général décrit comme une créature dénuée de toute
réflexion ! Parmi les personnages secondaires du récit que
l'on retrouve dans le téléfilm, on peut noter la présence de
l'aveugle ou celle de la fiancée de Victor, Elizabeth Fanshawe
(l'actrice Nicola Pagett). En outre, James Mason incarne le rôle du
Docteur John Polidori, en hommage à l'écrivain éponyme
italo-anglais connu pour sa nouvelle The
Vampyre
et qui ici est décrit comme un être sans scrupules et immoral dont
les ambitions originellement similaires à celles de Clerval et
Frankenstein vont bien plus loin. Notons également la présence de
Jane Seymour dans le double rôle d'Agatha et Prima. La première est
la fille du vieil aveugle tandis qu'après son décès, sa tête est
prélevée afin de servir à une nouvelle création. Prima devenant
ainsi la ''partenaire'' féminine de la créature. Un concept qui
sera notamment repris par James Whale en 1935 dans son chef-d’œuvre,
Bride of Frankenstein.
Bien que Jack Smight et ses scénaristes amenuisent le portrait
orgueilleux de Victor Frankenstein en le faisant apparaître pendant
quarante-cinq bonnes minutes comme un partisan des ambitions
dévorantes de son ami Henry Clarvel (et plus tard, de celles de
Polidori), Frankenstein: The True Story
n'offre pas qu'une vision ''romanesque'' du roman comme en
témoignent certaines séquences empruntant à l'horreur la plus
viscérale. Le téléfilm offre en outre une très belle
reconstitution de l'époque à travers ses décors et ses costumes.
Malgré ses larges prises de liberté, le téléfilm demeure une
mémorable adaptation qui vaut bien une majeure partie des films qui
au cinéma ont consacré leur sujet au mythe de Frankenstein...