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dimanche 14 juillet 2024

Outreau, un cauchemar français (2024) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Jusqu'à ce jour, L'affaire Outreau demeure l'une des affaires criminelles françaises les plus ignobles qu'aient eu à traiter la presse et la justice. Un fait-divers abominable autour de la pédophilie faisant écho au cas du belge Marc Dutroux qui seulement quelques années auparavant fut reconnu coupable de séquestrations, de viols et de meurtres sur des enfants en bas âge. Repoussant les limites de l'indicible puisque mettant en cause non plus seulement un individu mais des dizaines, L'affaire Outreau est un cas d'école sur lequel se sont penchés divers médias. La télévision, avec l'émission criminelle Faites entrer l'accusé qui lui a consacré un numéro en janvier 2008 sous le titre Myriam Badaoui, la menteuse et le juge. Un épisode exceptionnel suivi d'un débat quant à lui intitulé Outreau - Que sont-ils devenus ? Ensuite, le cinéma, sous diverses formes. Celle du documentaire avec Outreau, l'autre vérité de Serge Garde en 2013. Et celle de la fiction avec l'excellent Présumé coupable de Vincent Garenq qui mettait en scène Philippe Torreton dans le rôle de l'huissier Alain Marécaux qui aux côtés de son épouse et d'autres victimes fut accusé à tort par Myriam Badaoui ! Puis retour sur le petit écran avec le docu-fiction L'affaire d'Outreau d'olivier Ayache-Vidal et Agnès Pizzini en 2023 pour en venir à la toute dernière itération de ce sordide fait-divers qui continue de fasciner autant qu'il révulse avec Outreau, un cauchemar français, un documentaire en quatre parties pour une durée avoisinant les trois heures proposé par la plate-forme de streaming Netfix en 2024. Une mini série qui s'ancre dans le réel puisque ici, les ''acteurs'' de l'affaire sont ceux-là même qui d'un côté subirent les mensonges d'une mythomane incestueuse et pédophile, de son taré de mari, d'un couple d'amis et d'un juge froid et, contrairement à ce qu'il ose d'emblée affirmer dans ce documentaire, n'a jamais été en capacité de se remettre en question et de l'autre, la totalité des intervenants. Des avocats chargés de faire toute la lumière sur cette abominable affaire en passant par les journalistes un peu trop rapides dans leurs conclusions et jusqu'au procès lors duquel sera enfin mise en lumière la vérité.


Une affaire tellement incroyable qu'elle n'a en fait d'autre équivalent sur le territoire français que L'affaire du Petit Grégory. Il était sans doute nécessaire d'élargir le contexte plutôt que de le condenser dans ses grandes lignes tant il y eu de choses à dire sur les atrocités subies par les enfants des bourreaux ou sur cette étrange ''allégeance'' accordée par le Juge Fabrice Burgaud à cette vilaine créature qu'était Myriam Badaoui et qui mit la justice et de pauvres innocents à genoux. Le récit est évidemment glaçant. Il n'épargne pas les téléspectateurs qui découvrent l'affaire jusque dans ses détails les plus scabreux. Surtout, Outreau, un cauchemar français met en lumière l'absurdité et l'incohérence de certains témoignages, où l'horreur allait toujours plus loin et où certains, sans réfléchir, ont pris comme acquis la parole de ceux qui sentaient le besoin, sans cesse, d'en rajouter. Le plus délicat demeurant ici la parole même des enfants. Au ''bénéfice'' de cette affaire sans commune mesure, c'est bien celle-ci qui sera au final remise en question malgré l'intervention d'une ''experte'' qui comme le juge Burgaud est demeurée sur des principes pourtant mis en défaut lors du procès. L'approche de Outreau, un cauchemar français est bicéphale. Entre dégoût et fascination, le documentaire attise comme n'importe quel fait-divers authentique mais s'avère également passionnant dans ce qu'il dégage de romanesque au sens littéraire. Il n'est donc pas interdit de voir en cette mini-série, la reconstitution, images d'archives à l'appui, d'une affaire criminelle épouvantable tout comme un excellent thriller en quatre parties qu'aucun scénariste, même le plus zélé, aurait pu concevoir. Des dizaines d'ouvrages ont depuis l'affaire été édités. C'est donc avec de solides bases et un estomac en acier que l'amateur d'affaires judiciaires découvrira le documentaire. Une mini-série qui de manière fort inattendue convie l'ancien juge d'instruction Fabrice Burgaud à venir témoigner très régulièrement. Un personnage qui n'a absolument pas perdu de son arrogance, culotté au point d'affirmer que parmi les raisons qui le firent choisir la voie de la justice était la remise en question. Terme qui au mieux fera pouffer de rire et au pire rendre ce personnage plus médiocre encore qu'il ne l'a jamais été. Bref, Outreau, un cauchemar français est quoiqu'on en dise un passionnant documentaire sur les dérives de l'âme humaine ou sur celles des médias et de la justice...

 

mercredi 3 juillet 2024

Diabolique de Gabriel Aghion (2016) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

À l'origine de Diabolique il y eut l'Affaire des reclus de Monflanquin. Un fait-divers qui défraya la chronique française entre 2000 et 20009 lorsqu'un escroc du nom de Thierry Tilly s’immisça dans l'existence d'une riche famille de nobles du nom de Védrines. Convaincus par cet homme charismatique et manipulateur qu'ils étaient victimes d'un complot, onze membres de la famille s'enfermèrent pour une partie d'entre eux dans le château familial de Montflanquin tandis que d'autres se réfugièrent à Oxford, en Grande Bretagne. Le téléfilm est réalisé en 2016 par Gabriel Aghion auquel on doit notamment Pédale douce en 1996, Belle maman en 1999, Absolument fabuleux en 2001 ou encore Pédale dure en 2004, Bref, pas de quoi se réjouir d'avoir une filmographie exemplaire. Diabolique est un téléfilm qui fut tout d'abord diffusé en Belgique avant d'apparaître pour la première fois sur nos petits écrans le 5 avril 2016 sur France 3. Le réalisateur s'inspire en outre de l'ouvrage écrit par Ghislaine de Védrines, celle-là même qui parmi les membres de la famille fit justement entrer le loup dans la bergerie. Incarnée à l'écran par Michèle Laroque, cette dernière est donc confrontée à Laurent Stocker qui de son côté interprète Thomas Texier, l'alter ego fictionnel de Thierry Tilly. Avec plus ou moins de conviction, Gabriel Aghion tente de montrer la machine infernale mise en place par cet individu hautement qualifié dans les domaines de la manipulation et du mensonge. Pourtant, et c'est sans doute ce qui empêche le téléfilm d'être aussi puissant dans sa révélation finale qu'avait pu l'être celle de l'éponyme Diaboliques d'Henri-Georges Clouzot en son temps, le fait d'avoir à juste titre entendu parler à l'époque de l'authentique fait-divers écarte tout suspens quant à la conclusion du récit. En outre, l'affaire aurait sans doute mérité un déploiement beaucoup plus conséquent en terme d'écriture car si l'apparent renoncement financier de l'antagoniste du récit explique l'emprise et la confiance qu'il génère auprès des principaux intéressés, la rapidité avec laquelle l'homme parvient à faire le vide autour des membres de la famille peut paraître un tant soit peu complaisante.


Dans les rôles de Gérard Anger et Isabelle de Lassay, Philippe Résimont et Anne Consigny apparaissent donc comme les interprètes les plus convaincants. Ceux qui en incarnant le doute permettent de contrebalancer cette ''folie'' qui paraît s'être emparée des autres membres de la famille vivant désormais reclus dans leur luxueuse propriété et sous le joug d'un Thomas Texier devenu essentiel au maintien et à la cohésion de la famille et de sa richesse en terme de patrimoine. Les moyens mis en place afin de démontrer dans quelles proportions l'individu est parvenu à instaurer un climat de paranoïa poussant la famille Védrines à s'isoler du reste du monde jusqu'à éviter tout contact avec la moindre de leur relation et chasser tous ceux qui ne partagent pas leur opinion sur la situation manque parfois de cohérence. Cette vitesse avec laquelle Hélène de Lassay Anger, qui n'est autre que le nom donné ici à Ghislaine de Védrines, boit littéralement les paroles de son nouveau mentor. Quitte à humilier, voire chasser ceux qui nient l'authenticité du personnage. En la matière, Laurent Stocker incarne parfaitement cet être affable, apparemment désintéressé et capable de résoudre à lui seul tous les maux qui touchent cette famille désormais en plein désarroi. Il n'en demeure pas moins qu'une certaine tension naît au sein du récit, devant ce déploiement ininterrompu de prétextes visant à éloigner la famille de tout contact extérieur comme l'entreprendrait n'importe quel gourou. Gabriel Aghion crée un certain malaise. Surtout si l'on prend en compte le fait que les événements sont ici inspirés d'un fait-divers réel. L'on prend alors la mesure du drame et de ses conséquences sur la stabilité d'une famille capable d'exploser face à la démoniaque entreprise d'un parfait inconnu...


 

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