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mardi 4 février 2025

Rivages de Jonathan Rio et Monica Rattazzi (2025) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Le manque d''inspiration en France en serait-il arrivé au point de suggérer du fantastique ou de la science-fiction dans une œuvre qui n'en a peut-être que les apparences ? Car si l'observation d'un phénomène inexpliqué par l'héroïne de Rivages laisse effectivement planer le doute quant aux origines des événements qui vont causer le naufrage d'un chalutier et la disparition de ses passagers dans la baie de Fécamp, il y a de fortes chances pour qu'une partie des téléspectateurs se sente flouée malgré les qualités indéniables que revêt cette mini-série de six épisodes produite par France Télévisions ; laquelle, comme le disait fort justement ma compagne, rappelle ces séries de l'été que nous proposait TF1  il y a une bonne vingtaine d'années  ! Après une séquence d'ouverture qui met le public en condition lors de l'intrigante apparition d'un curieux ''objet'' sous-marin que chacun peut voir comme un phénomène relevant de l'imaginaire de scénaristes inspirés par des œuvres telles que le formidable Abyss de James Cameron, la question se pose alors sur l'éventualité d'une présence extraterrestre... Le script tourne également autour de la jeune océanographe Abigail Dufay (Fleur Geffrier), employée par l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer et qui, dépêchée sur les lieux du drame, réapparaît en fait trois ans après avoir vécu elle-même un malheur qui la poussa subitement à tout quitter. Bien plus que ce qu'il se passe sous les eaux de la baie, les créateurs Jonathan Rio et Monica Rattazzi semblent parfois plus préoccupés par le développement de l'histoire de leur héroïne et des personnes qui partagent son existence : Julien (Guillaume Labbé), le mari qu'elle a abandonné, Jimmy(excellent Ewenn Weber), le fils de ce dernier, atteint de surdité, ses propres parents (Thierry Godard et Anne Loiret dans les rôles de Henri et Joane), sa belle-sœur Sylvia (Olivia Côte) et bien entendu, au vu du contexte géographique, toute une population de pêcheurs ainsi que quelques personnages secondaires qui seront impliqués de manière plus ou moins importante. On pense notamment au professeur de SVT, Youssef (Younès Boucif), à Laurent, le supérieur d'Abigail qu'interprète Daniel Njo Lobé ou encore à Valérie Dashwood qui incarne quant à elle la commandante de l'armée française, Calderi... et sans oublier la présence de l'excellent Jean-Marc Barr qui, près de quarante ans après avoir interprété le rôle de Jacques Mayol dans Le grand bleu de Luc Besson, renoue ici avec les fonds marins.


Les amateurs du feuilleton Ici tout commence reconnaîtront l'actrice Lucia Passaniti qui, après être surtout apparue lors de la première saison, n'a pas fait grand chose depuis en dehors de sa présence au sein du casting de Rivages. Un personnage qui d'ailleurs se fait tout d'abord relativement discret (elle n'est effectivement au départ que la responsable vidéo de la Ville de Fécamp) avant de déployer une armada de compétences qui finissent par rendre le personnage un brin ridicule. Elle passe ainsi de la vidéaste travaillant officiellement pour la mairie à l'experte en hacking informatique, en pilotage de drones sous-marins (arrachant presque des mains les commandes de deux appareils tenues jusque là par un militaire que l'on imagine pourtant être parfaitement dans son élément) en langue des signes (alors que rien ne prédispose au départ que le personnage l'ait apprise), etc, etc... Bref, tout ceci ressemble à de l'économie faite sur d'éventuels personnages supplémentaires qui, chacun avec leurs compétences, auraient augmenté le budget. Alors, pourquoi ne pas concentrer tous les efforts en un seul d'entre eux ? Concernant l'intrigue en elle-même, le choix d'intercaler le sujet du drame que vécurent Abigail, Julien et par extension leurs familles respectives et leurs proches au mystère qui entoure le naufrage du chalutier et bientôt celui d'un porte-container permet surtout de rallonger une série qui sans cela n'aurait sans doute pu excéder les deux ou trois épisodes. D'ailleurs, malgré l'implication du drame en question, lequel permet tout de même d'assister à des séquences réellement poignantes (l'une des grandes force de Rivages demeure en ce sens), on sent bien vers la fin que le scénario arrive en bout de course. Surtout lors du sixième épisode où les événements stagnent un peu, histoire d'aligner sa durée sur celle des autres. Il est donc difficile de se faire une opinion réellement tranchée. D'un point de vue personnel, il nous aura fallu deux soirées pour compléter la série. Deux fois trois épisodes dont la ''première'' partie fut très encourageante mais dont la tension et l'engouement se sont malheureusement quelque peu étiolés au fil des quatrième, cinquième et surtout sixième épisode qui pourtant nous avait été vendu comme étant très émouvant.. Une émotion qui existe, oui, mais qui semble surtout avoir été concentrée autour de trois premiers épisodes franchement réussis. Moins ''merveilleux'' que nous pouvions le supposer puisque finalement plutôt réaliste, s'inscrivant dans une démarche pro-environnementale, teintée de mystère et de drames parfois bouleversants, la série Rivages s'avère être plutôt convaincante même s'il n'est pas certain que l'on souhaite s'y replonger un jour...


 

jeudi 9 janvier 2025

Panique au 13 de Gaël Leforestier (2024) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Les boites de nuit sont des lieux qui catalysent certaines des peurs de l'actrice Isabelle Nanty. Pourquoi ? Parce qu'il y a un demi-siècle environ, la fille de son parrain décéda dans un terrible incendie qui se déclara dans un night-club. De quoi s'étonner de la découvrir ainsi dans le rôle de Martine Leroux, la banquière d'un propriétaire de boite de nuit en pleine déroute qui, si le soit du 31 décembre, n'arrive pas à engranger suffisamment d'argent pour éponger ses dettes, devra mettre les clés sous la porte ! Le propriétaire en question du Passo Club, c'est Arnaud. Le compte à rebours débute dès sa sortie de la banque. Il est midi et il n'a que quelques heures pour réunir son équipe, charger chacun de ses employés d'une mission spécifique et attirer le plus de clients possible. Entre-temps, il va devoir se faire comprendre par l'électricien d'origine portugaise Sanchez (François-Xavier Demaison) lors du remplacement de l'enseigne lumineuse de la boite, gérer ses parents qui veulent absolument l'aider dans sa tâche (Michèle Bernier et Lionnel Astier), se faire comprendre par son plus proche collaborateur Tom (Tom Villa), trouver un nouveau chef cuisinier ou encore manager DJ Sylvain (Pierre-François Martin-Laval), le disc-jockey de la soirée. Autant dire que pour Arnaud, la soirée et la nuit à venir ne seront pas de tout repos. Diffusé le 30 décembre dernier sur TF1, soit deux semaines après être passé à la télévision belge sur RTL tvi, Panique au 31 porte très bien son titre. Téléfilm réalisé par l'animateur de télévision, le réalisateur et scénariste Gaël Leforestier qui se fit connaître au milieu des années quatre-vingt dix en apparaissant comme chroniqueur dans l'émission de Michel Drucker Studio Gabriel, Panique au 31 sonne tout d'abord comme une simili pièce de théâtre. Mais le téléfilm est d'abord et avant tout un ersatz de l'émission de télévision humoristique française créée en 1990 par Pierre Palmade, Le grand restaurant.


À l'origine intitulé Le grand dîner, l'émission qui changea donc de titre vingt ans plus tard mettait en scène une foultitude de vedettes du petit et du grand écran français dans des situations cocasses, lesquelles s'installaient à l'une des tables d'un prestigieux restaurant tenu par Pierre (Palmade), le maître d'hôtel. Exit le restaurant et place donc à une boite de nuit en plein déclin qui à l'issue de cette fatidique nuit du 31 décembre 2024 pourra soit continuer à ouvrir ses portes, soit sera rasée sur demande de la banquière d'Arnaud. Un Arnaud incarné par Arnaud Ducret qui après avoir débuté à la télévision a prolongé sa carrière avec succès sur grand écran avant de réapparaître ponctuellement sur le petit écran comme dans le cas du téléfilm de Gaël Leforestier. Le scénario lui ayant été d'ailleurs confié ainsi qu'à TomVilla (et quelques autres collaborateurs), les vannes fusent à très grande vitesse. Si bien que l'on n'a pas vraiment le temps de s'ennuyer. Et ce, même si les gags ne sont pas tous très fins. Pierre-François Martin-Laval endosse son éternel costume de comique cascadeur ringard tandis que la troupe autour d'Arnaud Ducret échange quelques sympathiques dialogues parfois très bien sentis. Panique au 13 charrie quelques séquences et personnages parfois inutiles. Il y a donc à boire (Arnaud Ducret, Isabelle Nanty, Tom Villa ou Cartman dans le rôle du serveur à la mémoire infaillible atteint de troubles de la... mémoire!) et à manger (Mathieu Madénian, Michèle Bernier, Lionnel Astier). Des caméos qui n'ont absolument aucun intérêt (celui de Corrine Masiero ou pire, l'intervention de Laurent Ruquier). Ensuite, tout n'est plus qu'histoire de goûts. Entre les Bodin's qui apparaissent à plusieurs reprises sous leurs meilleurs apparats, Michaël Gregorio qui ne fait que de la figuration, le couple Évelyne Bouix et Pierre Arditi dont les personnages semblent directement provenir du Grand Restaurant ou les deux acteurs qui interprètent les videurs/physionomistes du Passo Club, le spectateur n'aura pas le temps de s'ennuyer. Un brin désuet, certains diront sans doute que Panique au 13 s'adresse d'abord et avant tout à celles et ceux qui aiment finir les festivités de fin d'année au son de La chenille ou du Petit bonhomme en mousse. C'est peut-être et même sûrement vrai, mais quelle importance ?

 

mercredi 8 janvier 2025

Tomorrow and I : Un bouddha high-tech de Paween Purijitpanya (2024) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Après un premier épisode très riche qui promettait une suite prometteuse, la projection de Paradistopie fut une véritable douche froide. Passant de la finesse et la sobriété de Moutons noirs à l'un des spectacles les plus vulgaires et grossièrement abordés auquel il nous ait été donné d'assister, c'est contre la décision de décrire chacun des épisodes de Tomorrow and I que j'ai finalement choisi d'éclipser cette histoire tournant autour des mœurs thaïlandaises s'agissant de la sexualité et de la prostitution qui là-bas, est totalement proscrite depuis 1960. Un épisode dans lequel la fille d'une ancienne prostituée depuis décédée montait une entreprise produisant des ''Robots-putes'' afin de pallier à la demande de clients accrocs au sexe ! Ouais, vulgaire, c'est bien le mot. Un étalage de fesses et de poitrines et de positions sexuelles très équivoques qui laissaient planer un doute sur l'éventuelle profondeur du message. Bref, c'est avec des pincettes que nous abordions Un bouddha high-tech. Bien que se situant lui aussi dans un futur dystopique, cet épisode d'une quatre-vingtaine de minutes environ allait nous faire envisager le précédent comme une erreur de parcours. Une fausse note dont les fondements allaient fort heureusement être rétablis lors de ce nouveau récit mettant désormais en scène le moine Mönch Anek (l'acteur, animateur de télévision et aventurier thaïlandais Ray MacDonald). Dans une Thaïlande où le Bouddhisme n'a plus les faveurs de la population, notre héros et les quelques moines qui avec lui entretiennent un temple déserté par le public vivent d'offrandes. Un bouddha high-tech a beau se dérouler au milieu du vingt et unième siècle, son auteur semble vouloir rappeler ses spectateurs au mauvais souvenir de la triple crise qui toucha le bouddhisme entre 1990 et 1996. Dans le cas de Un bouddha high-tech, il s'agit donc de reproduire les conséquences de l'avènement de l'aire numérique. C'est ainsi que nos moines bouddhistes vont se retrouver confrontés à une intelligence artificielle créée de toute pièce par un certain Néo (l'acteur Bhumibhat Thavornsiri). S'y confrontent la spiritualité des uns et un système de mérite vicié par le désir sans cesse renouvelé d'engranger des points des autres.


Le procédé est simple : une fois acquit le programme ULTRA, son possesseur se voit doté d'un collier qui lui permet d'entrer en connexion avec l'Entreprise qui contrôle l'appareil et chaque fois que son utilisateur fait une bonne action, il est crédité d'un certain nombre de points évoluant en fonction de ses actes bienfaiteurs. Des points qui permettent ainsi d'améliorer grandement l'existence des concitoyens et de l'utilisateur lui-même qui avec ces points, peut ainsi s'offrir ce qu'il désire. Mais à trop vouloir accumuler les dits points, l'usage du programme ULTRA va forcément causer des dérives. Dans une certaine mesure, Un bouddha high-tech s'adresse tout d'abord au public thaïlandais. Et plus loin, à celles et ceux qui possèdent une solide connaissance en matière de bouddhisme. Ce qui n'empêchera pas les novices en la matière de suivre ce duel entre spiritualité et technologie. La mécanique est bien rodée puisque tout comme dans les deux précédents épisodes, Un bouddha high-tech est nourri de nombreux flash-back qui s'intéressent aux motivations des uns et des autres. Si Mönch Anek a quitté l'entreprise qu'il employait, c'est pour honorer la demande qu'il fit à sa mère de devenir moine avant qu'elle ne meure. Et si Néo semble avoir créé ULTRA afin de nuire définitivement au bouddhisme, c'est parce qu'il fut lui-même le témoin d'un terrible drame lié à cette religion et dont il fut l'un des acteurs. Porté par une incarnation de Ray MacDonald totalement enivrante, Un bouddha high-tech n'en est pas moins une critique féroce de la société actuelle où le paraître et les besoins personnels préoccupent davantage les populations que le bien-être communautaire. Son auteur ira même jusqu'à donner un coup de pied dans la fourmilière du bouddhisme, touché lui aussi comme n'importe quelle religion par des scandales liés à la pédophilie. Bref, si Paradistopie était très dispensable, Un bouddha high-tech est quant à lui et tout comme Moutons noirs, une excellente proposition de science-fiction exotico-dystopique...

 

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