
Lorsqu'il
y a deux ou trois ans un ami à moi avait évoqué la plateforme
Netflix, la première pensée qui m'est venue était de me
dire qu'une fois encore, l'un de mes potes était tombé dans un
piège à cons. Avant cela, je n'en avais jamais entendu parler, et
même, pourquoi aurais-je déboursé un centime alors que je pouvais
à loisir télécharger en toute illégalité n'importe quel film ou
série, de n'importe quelle époque et de n'importe quelle origine ?
Et puis, lorsque l'occasion de m'y coller s'est réellement
présentée, ma première réaction a été de me dire que cette
entreprise américaine proposant des films et des séries télévisées
en flux continu n'avait sans doute pas grand chose à me proposer
d'intéressant. Ce qui était d'ailleurs vrai. Surtout si l'on
considère en cela que mon immense mauvaise foi ne m'avait pas poussé
à faire davantage que deux ou trois recherches sur le moteur interne
de Netlix avant d'affirmer pour moi-même, ainsi que pour les
autres à voix haute et perchée, que « Netflix, c'est de la
merde. Y'a que des séries et des films pour adolescents boutonneux
et décérébrés ». Comme seuls les imbéciles ne changent
pas d'avis, chose que je ne cesse de me répéter afin de ne plus
camper bêtement et trop fermement sur mes positions initiales, j'ai
finalement accepté de « sacrifier » quelques
instants à cet étrange outil proposant tant de films, tant de
séries, tant de spectacles et tant de documentaires pour une somme
si modique.
Une
question que je ne cesse de me poser, à laquelle je laisse pourtant
le champ libre afin de me consacrer désormais presque corps et âme
au contenu de Netflix.
Reconnaissons-le, si en bien des occasions, j'ai tendance à mettre
l'ordinateur sur « off »,
n'ayant rien trouvé de réellement concluant (les classiques
disponibles, je les ai déjà vus, et quant aux autres, la plupart ne
sont que de sombres merdes qui ne méritent pas mon attention !
(oui, je le reconnais, je suis modeste), il y a parfois de bonnes
surprises. Et même d'excellentes.

Tout
d'abord, je voudrais rendre hommage à Micou et Anna, sans
lesquelles, je serai demeuré le vieil ours buté, coincé dans ma
bulle « pro-téléchargement illégal »,
des œillères chevalines plantées au milieu du visage, à regarder
devant moi, sourd à toutes propositions. Le genre à finir seul, en
robe de chambre et chaussons molletonnés, dans un fauteuil à faire
des mots fléchés, ou à bouffer à l'aide d'un plateau repas en
attendant « Questions pour un Champion ».
Merde ! J'ai quand même failli m'y laisser glisser. La première
débourse la maille (déjà), mais est surtout d'un précieux
conseil. C'est d'abord grâce à elle qu'est entré dans ma vie
Netflix. Pourtant, je
devrais lui en vouloir. Comme je devrais en vouloir à Anna. Comme si
l'une m'avait maintenu le bras ouvert, manche relevée jusqu'au
coude, et la seconde m'avait injecté une dose d'héroïne.

Faut
quand même pas déconner. Sur ce coup là, j'ai l'impression d'avoir
pris la place de Sara Goldfarb du traumatisant Requiem
fort a Dream de Darren
Aronofsky. Surtout depuis hier. Anna ne me contredira pas lorsque
j'affirme que les pouvoirs de suggestion, parfois hypnotique, et de
la dépendance peuvent avoir de lourdes conséquences. Au point que
tout le reste n'ait plus aucune importance. Et dire que ce délicieux poison que l'on s'injecte directement à travers la rétine
ne coûte pas plus d'un paquet de clopes, j'ai presque peur du complot
ourdi par des hommes d'états cherchant à lobotomiser leurs
concitoyens en les éloignant des choses fondamentales de l'existence
en les poussant à pénétrer des univers sans cesses inédits.
Ces
fameuses drogues d'ailleurs, dont, fort heureusement, celles-ci n'ont
en réalité pas vraiment d'incidences physiologiques. Tout au plus,
certaines feront naître chez certains, des vocations. Mais de quoi
je parle, là !!!

DARK,
est la série qui nous tient si fort en haleine. Et tel est son nom.
Bienvenue à Winden, ville imaginaire d'Allemagne, dont la population
est digne de celle rencontrée à quelques milliers de kilomètres de
là, dans une autre cité imaginaire du nom de Twin Peaks. Mais ne
croyez pas que le cinéaste suisse Baran bo Odar se soit contenté de
reproduire à l'européenne le flamboyant contexte de la série culte
de David Lynch. Non. Car le récit de Dark,
la série, n'a rien de commun avec Twin Peaks,
la série. A part peut-être l'intelligence de son écriture. Encore
heureux que d'avoir été écrit à dix mains par le cinéaste
lui-même mais aussi par Jantje
Friese, Martin Behnke, Ronny Schalk et Marc O. Seng, Dark
est
de plus magistralement interprété. Les amateurs de surnaturels,
mais pas ceux qui vouent un amour exclusif aux fantômes, aux
vampires ou aux zombies, adoreront cette excellente série mêlant
avec beaucoup de génie thriller et fantastique. L'une des qualités
essentielles de Dark
est
d'évoquer certaines thématiques (comme le voyage dans le temps)
sans pour autant être redondante. On ne s'y ennuie pas un seul
instant et pour les amateurs de twists, cette série tournée à
Berlin (et oui !) est un véritable festival de révélations.
Sans trop vouloir en révéler le contenu, disons que Dark
propose
une intrigue tournant autour de plusieurs disparitions ayant eu lieu
à trente-trois ans d'intervalles. La série propose ainsi de passer
de l'année 2019, à l'année 1986, et vice-versa. Les histoires
personnelles de ses habitants s'entremêlent, toujours avec un luxe
de cohérence qui parfois pêche dans d'autres séries du même
genre. L'interprétation est sans faille et chaque personnage est
scrupuleusement étudié. Le scénario est complexe tout en étant
admirablement construit, ce qui rend finalement l'intrigue limpide.
Il n'est d'ailleurs pas rare que l'on soit épaté par certaines
révélations. L'Allemagne et Netflix nous offrent en ce début
d'année 2018, l'une des meilleures séries fantastiques de ces
dernier mois. A découvrir de toute urgence...