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mardi 11 janvier 2022

Mange de Julia Ducournau et Virgile Bramly (2012) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Avant de remporter la Palme d'or au festival de Cannes l'année passée avec Titane et de nombreuses récompenses entre 2016 et 2018 pour Grave, la réalisatrice française Julia Ducournau débuta sa carrière en 2005 en signant un premier court-métrage intitulé Corps-Vivants puis deux autres en 2007 et 2011 (dont le très réussi Junior dans lequel apparaîtra déjà l'actrice Garance Marillier, l'un des personnages féminins du film qui nous intéresse ici, et vedette de Grave puis de Titane par la suite). Puis vint en 2012, son premier long-métrage. Un format prévu pour le petit écran qui n'empêchera pas la future ''palmée'' de s'attaquer à ses thèmes de prédilections que semblent être les désordres psychiques et physiologiques. Avec son titre passe-partout, si Mange aborde effectivement le trouble de l'appétit connu sous le nom d'anorexie mentale, ce premier long-métrage réalisé en collaboration avec l'acteur Virgile Bramly (dont il s'agira ici de l'unique mise en scène) semble tout d'abord être une histoire de vengeance. Celle d'une adolescente obèse et mal dans sa peau qui une fois devenue une adulte et une avocate brillante qui gagne tous ses procès vit son alimentation de manière compliquée. Vivant auprès de l'inspecteur Igor (l'acteur Julien Boisselier), Laura assiste à l'une de ces réunions auprès d'autres anorexiques et de boulimiques lorsque entre dans la pièce qui les réunit tous, la blonde Shirley (qu'interprète l'actrice Élodie Frenck). Une nouvelle venue en qui la jeune avocate reconnaît l'une des collégiennes qui lui menèrent la vie dure lors de sa scolarité. Laura n'a alors plus qu'une idée en tête : se venger de celle qui l'humilia. D'autant plus que le fantôme de celle qui fut cette adolescente obèse ne cesse de la pousser à punir Shirley qui elle-même est anorexique...



En vedette principale de Mange, nous retrouvons l'actrice Jennifer Decker qui trois ans auparavant, et dans le rôle de Harmony, fit du gringue à Étienne, l'un des personnages interprété par le toujours excellent Jean-Pierre Darroussin dans Erreur de la banque en votre faveur de Michel Munz et Gérard Bitton. Changement de décor, de rôle et donc d'attitude puisque l'adolescente de dix-sept ans s'est désormais muée en une toute jeune adulte ayant pris le parti de défendre des hommes accusés de battre leur compagne.... ou leur compagnon ! Elle y incarne une Laura apparemment saine dans son corps et dans sa tête puisque depuis un an elle semble avoir remis un peu d'ordre dans son esprit et vit aux côtés d'un homme charmant et de sa fille Anna (Garance Marillier). Mais cette petite vie devenue quelque peu tranquille va changer dès l'apparition de Shirley qu'interprète donc une Élodie Frenck dont l'existence va être bousculée au contact d'une Laura qu'elle ne reconnaît pas comme ayant été son souffre-douleur des années en arrière. Mange explore la longue dérive d'une femme piégée par une ''marraine'' aux sombres pensées qui, la chose est commune, finira par s'attacher à sa victime potentielle. Situé entre les appartements des deux femmes, un bar à l'esprit punk-rock tenu par Vinnie (Gustave Kervern dont les apparitions sont malheureusement trop brèves puisqu'il interprète ici l'un de ses meilleurs rôles) et un hôtel où la blonde s'envoie en l'air tandis qu'au rez de chaussée, Laura attend qu'elle ait fini sa petite affaire en compagnie du gérant qui l'abreuve de films indiens !


Julia Ducournau et Virgile Bramly jouent aux montagnes russes et l'on ne sait plus trop où veut en venir leur héroïne. Les deux auteurs noient le poisson en laissant supposer qu'un certain attachement de l'une envers l'autre pourrait effacer ce passé traumatique qui a rendu l'avocate anorexique. Cela sans prendre conscience que la vengeance à proprement parler pourrait détruire et le couple de Laura, et celui de Shirley (laquelle, petite précision, est mère d'une adolescente qui aurait sans doute mérité quelques fessées et gifles de la part de ses parents). Mange hurle sa hargne en silence. Les deux principales actrices féminines sont plus que convaincantes dans cette sororie viciée dès le départ mais dont l'issue demeure incertaine. Le pouvoir des mots étant ce qu'il est, dans ce cas précis l'emploi de la violence frontale et graphique n'est jamais requis. Un téléfilm de qualité...

 

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