Si l'on suppose qu'une
intelligence artificielle quelle qu'elle soit ne peut être capable
de réflexion ou d'émotion lorsqu'elle est chargée de pondre un
roman en une poignée de minutes ou d'imaginer le script d'un épisode
de série télé ou de long-métrage, il est en revanche des concepts
qui dans le premier épisode de la nouvelle saison de Black
Mirror
sont par contre vérifiables chaque jour que Dieu fait. Ici, la
notion d'un créateur sur le plan théologique disparaît au profit
d'une technologie qui ne cesse de progresser au point de s'introduire
dans notre intimité bien au delà des limites que l'on croyait avoir
définies au moyens d'accord que l'on signe sans véritablement jeter
un œil à tout ce que ceux-ci sous-entendent dans leur globalité.
Depuis plus de dix ans, le créateur de la série Charlie Brooker
propose des saisons mises à disposition des abonnés de Netflix
avec
plus ou moins de régularité. La sixième faillit ne jamais voir le
jour. D'abord à cause de la pandémie de Coronavirus
qui toucha la planète, mais aussi, et peut-être surtout, parce que
la technologie évolue si rapidement que la précéder est devenu
chose quasiment impossible. L'ombre de ChatGPT
plane forcément sur la série et notamment sur ce premier épisode
intitulé Joan is Awfull.
Mais si Charlie Brooker avait bien l'intention de faire intervenir
cette ''petite'' révolution dans le monde de l'intelligence
artificielle, le résultat ne fut pas à la hauteur de ses
espérances. L’antériorité habituelle des précédentes saisons
sur l'évolution technologique n'est ici plus de mise puisque au
contraire, Joan is Awfull
se base inversement sur un authentique fait-divers entourant
l'affaire
Theranos, une start-up biomédicale dont la fondatrice Elizabeth
Holmes fut condamnée à onze années de prison pour fraude avant de
voir cette histoire très rapidement adaptée à la télévision !
Cependant, Black Mirror
qui d'origine est une série de science-fiction qui par principe
précède des événements qui dans le temps présent se doivent de
demeurer plus ou moins théoriques ajoute au fait-divers des éléments
qui reposent encore sur cette même science-fiction. Ici, un
ordinateur quantique qui génère seul du contenu généré à partir
de ce puissant outil qui en réalité, n'est pas encore en mesure de
proposer ce qui pourtant s'affichera à l'écran grâce au célèbre
fournisseur de contenu vidéo Netflx...
La
série n'a sans doute jamais aussi bien porté son nom que pour cet
épisode qui à travers des effets de miroirs retranscrit l'existence
de son héroïne contre son gré. Tout ça parce qu'elle n'a pas
entièrement lu le contrat qu'elle a signé lors de son engagement
dans l'entreprise qui l'emploie. Un reflex commun à la plupart
d'entre nous qui dénient l'utilité de lire les contrats de licences
auxquels l'on doit donner notre accord afin d'utiliser tel ou tel
programme informatique. La porte ouverte à toutes les dérives, en
somme. Comme cette suspicion qui laisse douter de la totale
imperméabilité de nos Smartphones qui semblent être pourtant de
véritables portes ouvertes capables de révéler des informations
personnelles que l'on préférerait garder pour soi. Nos téléphones
mobiles ne seraient en effet rien de moins que des mouchards.
Notamment interprété par Annie Murphy et Salma Hayek dans des
doubles-emplois Joan is Awfull
a beau être traité avec un certain sens de l'humour, ce première
épisode demeure cependant relativement glaçant dans sa description
d'une intimité bafouée à travers des procédures qui nous semblent
pourtant inoffensives. Netflix
démontre sa pleine capacité à accepter la critique et
l'auto-dérision, surtout lorsque Charlie Brooker et la réalisatrice
Ally Pankiw s'attaquent à la plate-forme qui héberge leur bébé.
Effet de mode ou pas, ironie réelle ou non, on n'échappe pas ici à
ce qui ne relève non plus de la technologie telle qu'elle pourra
être conçue très prochainement mais de certaines dérives
''culturelles'' comme le wokisme. Couples hétéros, homosexuels,
lesbiens et mixtes s'installent donc désormais et probablement
durablement dans le paysage de l'une des plus fameuses séries de
science-fiction, d'anticipation et dystopiques de ces dix ou quinze
dernières années. Pour cette entrée en matière de la sixième
saison, Joan is Awfull est
plutôt réussi même si certaines issues arrivent un peu trop
précipitamment. Notons que l'épisode réserve un twist plutôt
étonnant et quasi-imprévisible...
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