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lundi 3 juin 2019

The Society de Christopher Keyser (2019) - ★★★★★★★★☆☆




Au départ, c'est le rêve de bon nombre d'adolescents : vivre débarrassés de toute contrainte, loin des parents. Faire la fête, réduire l'ordre et la morale à leur plus simple expression. Ici, c'est un peu l'idée. Remettre en cause les habitudes de la jeunesse dorée américaine. Celle où les nantis habitent de belles baraques, sont les élèves les plus populaires de l'université (ahhhh, ces fameux joueurs de football américain qui pourtant ne cesseront de perdre en crédibilité, les auteurs ayant apparemment eu la main généreuse en en faisant au fil des épisodes, de parfaits abrutis), tandis que les moins chanceux sont mis sur le banc de touche, sont raillés, parfois même méprisés. West Ham ressemble à bon nombre de petites villes américaines. Du moins jusqu'à ce qu'un soir, et alors qu'une sortie scolaire en bus ayant réuni tous les adolescents de la ville ait été compromise, ces derniers, de retour chez eux, constatent que West Ham a été débarrassé de tous les adultes. Alors que les bus disparaissent en file indienne (d'où une réflexion très intéressante de la part d'Anna qui se demandait alors où ces derniers avaient bien pu s’éclipser puisque la ville, autrefois ouverte sur le monde, est désormais entourée d'une vaste forêt qui semble n'avoir pas de limites), chacun tente de rentrer chez lui.

Alors que le soir même, ils profitent de l'occasion pour faire la fête dans l'église, dès le lendemain matin, Cassandra, Allie, Sam, Helena, Will, Kelly, Elle, Gordie, Grizz, Campbell et les autres sont bien obligés de se rendre à l'évidence. Eux, ainsi que les autres adolescents de West Ham sont seuls. Livrés à eux-mêmes, une partie d'entre eux compte sur Cassandra pour gérer la situation même si certains, comme Harry ou Campbell apprécient moyennement l'idée de devoir partager leur maison et leurs biens avec d'autres. Petit à petit, l'ordre revient. Mais le meurtre subit de Cassandra pousse sa jeune sœur Allie à reprendre les rennes d'un pouvoir qu'elle ne pourra maintenir qu'avec l'aide précieuse de Will et d'une ''Garde'' constituée d'anciens joueurs de football de l'université. Peu à peu, Allie impose des règles nécessaires qui s'avèrent cependant très contraignantes. A West Ham, les esprits s'échauffent et certains commencent à fomenter dans leur coin un renversement des nouvelles règles imposées par Allie et son entourage...

Réduire The Society aux quelques séances de baise, à cette musique tonitruante qui vous cingle les tympans, ou aux fêtes alcoolisées répétées serait une grave erreur. Car cette approche au départ, toute adolescente, permet surtout à la série créée par le scénariste et producteur américain Christopher Keyser de mettre en évidence toute la noirceur du propos qui peu à peu va prendre une part de plus en plus importante délaissant graduellement l'aspect festif d'un tel sujet. Jusqu'à la bande originale qui abandonne musique techno et rock FM pour des sonorités beaucoup plus sombres et dramatiques. Le propos de The Society vire à 360° et offre un condensé de ce que pourrait donner une société nouvellement établie mise entre les mains de très jeunes adultes inexpérimentés. Après deux ou trois épisodes essentiellement constitués de vides scénaristiques qui pourraient abandonner en chemin une partie des spectateurs demeurant indifférents aux histoires de cœur de ses personnages, la série de Christopher Keyser se révèle incroyablement addictive. Non seulement grâce au récit qui peu à peu s'étoffe pour ressembler à un très, très long épisode de l'admirable série Black Mirror, mais aussi ET SURTOUT grâce à la plupart de ses interprètes. Rachel Keller et Kathryn Newton (interprètes respectives des sœurs Pressman, Cassandra et Allie), Jacques Colimon, dans le rôle de Will, Kristine Froseth, Sean Berdy, Olivia DeJonge, José Julian, mais également Alex Fitzalan dans le rôle de Harry Bingham et SURTOUT, oui, SURTOUT, grâce à l'impressionnant Toby Wallace qui incarne le personnage de Campbell Eliot, victime d'une pathologie mentale qui lui confère une identité intellectuelle et morale unique ! Bien qu'aucune suite ne semble faire partie du planning de son créateur, The Society mérite amplement d'être poursuivie au delà de cette première et passionnante saison, d'autant plus que bon nombre de questions demeurent en suspend. On s'attache aux personnages. Difficile en effet de rester insensible aux rapports qu'entretiennent Becca et Sam, ou entre celui-ci et Grizz (formidable Jack Mulhern). ET même ceux, particulièrement malsains, que partagent Campbell et sa ''prisonnière'' Elle... Netflix prouve encore une fois que la plate-forme est capable de proposer des produits fort intéressants et au moins aussi dignes que les réseaux classiques de distribution. A découvrir absolument...

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