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samedi 12 janvier 2019

Black Mirror: Bandersnatch de David Slade (2018)




Toujours prompt à égratigner les nouvelle technologies de communication, de surveillance ou de sécurité en les explorant sous leurs aspects les plus sombres, la série Black Mirror repousse un peu plus loin les limites de son concept en faisant appel à la participation active des spectateurs en leur proposant un nouvel épisode au format plus long que d'habitude intitulé Black Mirror: Bandersnatch. Un film interactif qui contrairement à ce que pourraient prétendre ceux qui ne connurent pas l'époque bénie du Mega-CD de chez SEGA qui produisit dans les années quatre-vingt dix des jeux vidéos accompagnés de vidéo en Full Motion, n'est pas le premier « film » à proposer aux (télé)spectateurs de choisir à de nombreuses reprises la voie à prendre par le héros incarné ici par l'acteur Fionn Whitehead. Black Mirror: Bandersnatch ne fait donc que reprendre un principe qui en réalité remonterait même jusqu'au milieu des années soixante. Mais passons...
Conçu par le créateur de la série Charlie Brooker et réalisé par David Slade, cet épisode met donc à profit le spectateur en lui proposant de faire des choix qui non content d'avoir des répercussions sur le héros Stephan Butler, pose la délicate question de l'étique. Comme par exemple choisir entre le suicide de celui-ci ou de son nouvel ami Colin Ritman (excellent Will Poulter). L'épisode met en exergue le comportement de l'être humain face aux péripéties de ces héros exhibés dans des télé-réalités bêtifiantes, laissant le choix au spectateur d'être cruel ou non envers eux. Ici, l'auteur insiste pour que le spectateur connaisse un sort passablement identique à celui de son personnage, créateur d'un jeu vidéo qui apparaîtra aujourd'hui obsolète (le récit se déroule en 1984). Une œuvre en trois dimensions à choix multiples comme l'est le concept de cet épisode.

Le principe est alors des plus simple : le spectateur lance l'épisode, et au bout de quelques instants, il doit choisir entre deux marques de céréales qu'apprécie Stephan lors du petit déjeuner. Puis, un peu plus loin, dans le bus qui l'emporte, on décide quelle cassette audio il écoutera, ou quel album vinyl il achètera. Quelques mises en bouches qui paraissent anecdotiques et pourtant... si les deux premières n'auront aucune conséquence réelle sur la suite des événements, choisir par exemple de lui faire acheter l'album Phaedra de Tangerine Dream aura des répercussions sur la bande-son de Black Mirror: Bandersnatch durant le reste de l'épisode. Un épisode dans lequel sont développées diverses hypothèses quant aux événements qui se déroulent devant les yeux de spectateurs qui se rendront compte que le principe semble malheureusement vicié.
En effet, si Black Mirror: Bandersnatch mêle tour à tour passé tortueux, expériences scientifiques monstrueuses, paradoxe temporel, ou schizophrénie, il semble qu'il n'y ait malheureusement pas pour son héros d’échappatoire optimiste. Vu le nombre de ramifications possibles, on peut supposer que les directions à prendre et les fins sont nombreuses. Malheureusement, il semblerait que cet épisode soit conçu de telle manière que le spectateur finit par être contraint de revenir sur les pas de son héros afin de choisir une option qu'il avait d'abord décidé d'abandonner. D'une durée évaluée à une heure-trente, l'expérience Black Mirror: Bandersnatch pourra s'avérer bien plus longue. Tout dépend en fait des choix qui seront faits.

Si David Lynch n'aurait sans doute pas renié le concept, c'est parce que d'une certaine manière, Black Mirror: Bandersnatch lui ressemble. Surtout lorsque à l'orée de la conclusion, à ce moment très précis où le spectateur croit vivre les derniers instants de cet épisodes, tout semble reprendre dès le début, encore, et encore... jusqu'à ce que s'offre à lui LA solution qui semble convenir idéalement au personnage de Stefan. Est-il fou ? Est-il le sujet de manipulations ? Et si oui, par qui ? Juger du bien fondé du concept et lui mettre une note définitive est une gageure si l'on tient compte du fait que l'expérience peut prendre des formes multiples selon les choix accordés par le spectateur à son héros. D'un point de vue personnel, je dirais que le principe offre des perspectives alléchantes, perfectibles, et sacrément ambitieuses. Pour un coup d'essai, Black Mirror: Bandersnatch est plutôt une réussite... Un épisode et un concept dont on n'a pas finit de causer...

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