Toujours prompt à
égratigner les nouvelle technologies de communication, de
surveillance ou de sécurité en les explorant sous leurs aspects les
plus sombres, la série Black Mirror
repousse un peu plus loin les limites de son concept en faisant appel à
la participation active des spectateurs en leur proposant un nouvel
épisode au format plus long que d'habitude intitulé Black
Mirror: Bandersnatch.
Un film interactif qui contrairement à ce que pourraient prétendre
ceux qui ne connurent pas l'époque bénie du Mega-CD
de
chez SEGA qui produisit dans les années quatre-vingt dix des jeux
vidéos accompagnés de vidéo en Full
Motion, n'est
pas le premier « film »
à proposer aux (télé)spectateurs de choisir à de nombreuses
reprises la voie à prendre par le héros incarné ici par l'acteur
Fionn Whitehead. Black Mirror: Bandersnatch
ne fait donc que reprendre un principe qui en réalité remonterait
même jusqu'au milieu des années soixante. Mais passons...
Conçu
par le créateur de la série Charlie Brooker et réalisé par David Slade, cet épisode met donc à profit le
spectateur en lui proposant de faire des choix qui non content
d'avoir des répercussions sur le héros Stephan Butler, pose la
délicate question de l'étique. Comme par exemple choisir entre le
suicide de celui-ci ou de son nouvel ami Colin Ritman (excellent Will
Poulter). L'épisode met en exergue le comportement de l'être humain
face aux péripéties de ces héros exhibés dans des télé-réalités
bêtifiantes, laissant le choix au spectateur d'être cruel ou non
envers eux. Ici, l'auteur insiste pour que le spectateur connaisse un
sort passablement identique à celui de son personnage, créateur
d'un jeu vidéo qui apparaîtra aujourd'hui obsolète (le récit se
déroule en 1984). Une œuvre en trois dimensions à choix multiples
comme l'est le concept de cet épisode.
Le
principe est alors des plus simple : le spectateur lance
l'épisode, et au bout de quelques instants, il doit choisir entre
deux marques de céréales qu'apprécie Stephan lors du petit
déjeuner. Puis, un peu plus loin, dans le bus qui l'emporte, on
décide quelle cassette audio il écoutera, ou quel album vinyl il
achètera. Quelques mises en bouches qui paraissent anecdotiques et
pourtant... si les deux premières n'auront aucune conséquence
réelle sur la suite des événements, choisir par exemple de lui
faire acheter l'album Phaedra
de Tangerine Dream aura des répercussions sur la bande-son de Black
Mirror: Bandersnatch
durant le reste de l'épisode. Un épisode dans lequel sont
développées diverses hypothèses quant aux événements qui se
déroulent devant les yeux de spectateurs qui se rendront compte que
le principe semble malheureusement vicié.
En
effet, si Black Mirror: Bandersnatch
mêle tour à tour passé tortueux, expériences scientifiques
monstrueuses, paradoxe temporel, ou schizophrénie, il semble qu'il
n'y ait malheureusement pas pour son héros d’échappatoire
optimiste. Vu le nombre de ramifications possibles, on peut supposer
que les directions à prendre et les fins sont nombreuses.
Malheureusement, il semblerait que cet épisode soit conçu de telle
manière que le spectateur finit par être contraint de revenir sur
les pas de son héros afin de choisir une option qu'il avait d'abord
décidé d'abandonner. D'une durée évaluée à une heure-trente,
l'expérience Black Mirror: Bandersnatch pourra
s'avérer bien plus longue. Tout dépend en fait des choix qui seront
faits.
Si
David Lynch n'aurait sans doute pas renié le concept, c'est parce
que d'une certaine manière, Black Mirror:
Bandersnatch
lui ressemble. Surtout lorsque à l'orée de la conclusion, à ce
moment très précis où le spectateur croit vivre les derniers
instants de cet épisodes, tout semble reprendre dès le début,
encore, et encore... jusqu'à ce que s'offre à lui LA solution qui
semble convenir idéalement au personnage de Stefan. Est-il fou ?
Est-il le sujet de manipulations ? Et si oui, par qui ?
Juger du bien fondé du concept et lui mettre une note définitive
est une gageure si l'on tient compte du fait que l'expérience peut
prendre des formes multiples selon les choix accordés par le
spectateur à son héros. D'un point de vue personnel, je dirais que
le principe offre des perspectives alléchantes, perfectibles, et
sacrément ambitieuses. Pour un coup d'essai, Black
Mirror: Bandersnatch est
plutôt une réussite... Un épisode et un concept dont on n'a pas
finit de causer...
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