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vendredi 8 juin 2018

La Poupée Sanglante de (1976) - ★★★★★★★★★☆



Ceux qui découvrirent La Poupée Sanglante, adaptation télévisée de l'un des derniers romans de l'écrivain français Gaston Leroux, lors de sa première diffusion sur Antenne 2 en 1976 ne peuvent avoir oublié ce remarquable feuilleton qu'il est désormais de bon ton d'appeler mini-série. Une œuvre incroyablement riche, dense, admirablement écrite, s'inspirant de bon nombre de mythes du fantastique. En effet, les œuvres parmi les plus célèbres de Mary Shelley, de Bram Stocker, de Victor Hugo semblent avoir inspiré ce récit. Tout comme Barbe Bleue, le conte populaire dont la version la plus connue demeure celle écrite par Charles Perrault à la fin du dix-septième siècle. Est également évoqué, l'un de nos plus célèbres tueurs en série, un certain Henri Désiré Landru qui durant la première moitié du vingtième siècle se rendit coupable (ou du moins fut accusé) de onze meurtres. Mais l'ouvrage dont semble tout d'abord s'inspirer le roman original est L'Homme au Sable de l'écrivain allemand Ernst Theodor Amadeus Hoffmann, une nouvelle parue pour la première fois en 1817 dans le recueil des Contes nocturnes (Nachtstücke).
L'adaptation télévisée créée par le journaliste et verbicruciste Robert Scipion est mise en scène par le réalisateur et scénariste français Marcel Cravenne, auteur entre autres de Danse de Mort au cinéma, et de la toute aussi excellente mini-série L'Île aux Trente Cercueils diffusée sur le même réseau télévisé trois ans plus tard.

Au générique, nous retrouvons l'actrice Yolande Folliot, qui dans le rôle de Christine Norbert est la fille d'un horloger de génie qui aux côtés de son neveu (et futur époux de la jeune femme) a créé un automate à l'apparence parfaitement humaine auquel, malheureusement, il manque un soupçon d'âme. C'est du moins ce que semble penser Christine, laquelle se rapproche quelque peu du relieur qui travaille dans la boutique faisant face à la demeure des Norbert. Bénédict Masson, c'est son nom. Incarné à l'écran par l'acteur Jean-Paul Zehnacker (que l'on retrouvera dans l'autre grand succès télévisé de Marcel Cravenne ainsi qu'au cinéma dans Je Vais Craquer de François Leterrier en 1980 ou plus récemment dans MR 73 d'Olivier Marchal en 2008). Malheureusement pour lui, Bénédict à la malchance d'être laid. Bossu, le visage effrayant (joli travail de maquillage pour un résultat plutôt convainquant), il est cependant l'auteur de recueils de poèmes qui ne laissent pas Christine indifférente. Alors que plusieurs apprenties (que des femmes) ont disparues depuis qu'il les a engagées, certains habitants de la régions soupçonnent qu'il pourrait en être responsable. Un jour, Christine demande à Bénédict de lui rendre service en acceptant de l'accompagner jusqu'au château du marquis de Coulteray dont la femme semble être très malade. Gardant secret l'amour qu'il éprouve pour la belle Christine, Bénédict accepte de l'y suivre. Là-bas, d'étranges choses s'y déroulent...

« Ce qui est étrange... ce qui est unique, dans l'histoire de Bénédict Masson,c'est qu'en réalité, elle ne fait que commencer... »

Alors que tout joue en sa défaveur en raison de son physique ingrat, le personnage incarné est tour à tour effrayant, attachant, puis inquiétant, avant de devenir bouleversant. Victime de son apparence, il est au centre d'une intrigue mêlant policier, romance, et fantastique. Une aventure extraordinaire pour un homme, il faut le reconnaître, peu ordinaire, qui dans son malheur va renaître de ses cendres sous cette apparence à laquelle il n'espérait plus jamais pouvoir accéder.
Si La Poupée Sanglante est décomposée en six épisodes, deux actes se distinguent en réalité l'un de l'autre, d'une durée égale puisque se partageant chacun trois épisodes. La première partie se clôt par une véritable tragédie. La mort de Bénédict, cet être bienveillant, mais impulsif, accusé à tort d'être l'auteur d'une série de crimes dont il s'affirme être innocent. C'est ainsi, après la guillotine, que l'aspect fantastique de l'intrigue se renforce davantage et que l'on en apprend un peu plus sur les tenants et aboutissants de ce qui se trame derrière les murs de la demeure des Norbert.
Formidablement interprété, La Poupée Sanglante est fidèle au roman, et typique d'une époque malheureusement révolue. Dégageant un atmosphère très particulière que l'on ne retrouve plus de nos jours, la musique de la compositrice et illustratrice sonore française Betty Willemetz participe à l’envoûtement généré par ce récit touffu et pourtant très clair à suivre. Œuvre d'un réalisateur prenant autant soin de ses interprètes qu'en matière de mise en scène, les dialogues eux-mêmes participent de cette impression réelle et concrète de vivre une aventure située au début du siècle dernier.. Yolande Folliot est belle, séduisante, et désirable. Jean-Paul Zehnacker est inquiétant, tragique, et parfois très touchant... lorsqu'il n'est simplement pas effrayant lors de ses crises, fort impressionnantes. Le duo que campent les deux interprète ne doit pas nous faire oublier le reste du casting parmi lequel on reconnaîtra une certaine... Marthe Villalonga. Revoir aujourd'hui La Poupée Sanglante, c'est se replonger dans le passé, à l'époque où tout restait à inventer, où l'imaginaire faisait le reste. Un chef-d’œuvre de la petite lucarne (qui depuis a bien grandit) à redécouvrir d'urgence...




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